En 1359, il passe au service de Charles V, devient gouverneur de Pontorson. Ses exploits pour pacifier le Perche, le Maine, l’Anjou, la Normandie lui apportent une célébrité et un prestige considérables. Charles V le récompense en lui donnant un domaine et un château. Le voilà riche ! Il se rappelle alors le visage entrevu lors d’un combat singulier dont il était sorti vainqueur à Dinan : un visage de femme, la femme la plus belle qui soit ! Lui, l’homme le plus laid qu’on puisse imaginer ! Cette femme, c’est Tiphaine Raguenel, une perle rare, Tiphaine, très rare, jugez-en : elle est non seulement très belle, mais aussi intelligente, discrète, aimante. Elle appartient à l’une des plus anciennes familles bretonnes. Bertrand qui est habitué aux défis impossibles la demande en mariage ! Et elle se met à aimer ce guerrier couvert de gloire mais si disgracieux. Les noces ont lieu à Vitré, à l’automne 1363, dans un véritable délire populaire. Leur bonheur sera sans nuage. Tiphaine, pendant les longues périodes où Bertrand guerroie, aime se retirer au Mont-Saint-Michel.
Fait prisonnier à Auray – la bataille perdue contre le Prince noir –, du Guesclin est libéré grâce à la rançon versée par le roi de France qui le charge alors de délivrer le royaume des compagnies infestant les campagnes du royaume. Du Guesclin, auréolé de sa gloire de combattant invincible les rassemble sans mal à Châlon, et les conduit en Espagne affronter Pierre le Cruel. Mais, à la bataille de Najéra, le 3 avril 1367, le Breton et ses compagnies affrontent le Prince noir qui leur inflige une terrible défaite. Du Guesclin est emmené prisonnier à Bordeaux. Le Prince noir l’y garde une année au terme de laquelle il lui demande de fixer lui-même le montant de sa rançon : « Cent mille doublons d’or », répond fièrement du Guesclin. Le Prince noir lui répond : « Comment un pauvre chevalier breton pourra-t-il trouver une somme pareille ? » Alors du Guesclin a cette réplique passée dans l’histoire : « Sire, le roi de France en paiera la moitié, et le roi de Castille l’autre moitié. Et s’ils ne le veulent pas, toutes les femmes et les filles de France sachant filer s’useront les doigts pour ma délivrance ! » Le roi, le pape, Jeanne de Penthièvre et de nombreux seigneurs bretons paieront la rançon !
Nommé connétable en 1370 – chef suprême des armées royales –, du Guesclin se bat contre les Anglais qui sont de retour en France. Il les chasse de Normandie, les combat en Guyenne, dans le Poitou, en Saintonge. En avril 1372, avec l’aide d’Olivier IV de Clisson (l’éborgné d’Auray, fils du décapité de 1341 Olivier III) qui combat aussi contre le duc de Montfort, du Guesclin conquiert tout le duché de Bretagne que gouverne Jean IV. Celui-ci s’enfuit en Angleterre. Charles V prend alors une décision politiquement très maladroite : il décide l’annexion du duché de Bretagne ! Les Bretons n’acceptent pas cet acte d’autorité, et rappellent Jean IV qui revient triomphalement dans son duché le 3 avril 1379 à Saint-Malo. Jeanne de Penthièvre qui a tant combattu les Montfort l’accueille à genoux : plutôt l’alliance que l’appartenance à la France ! Déçu par la tournure que prennent les événements, du Guesclin parti déloger une bande de pillards à Châteauneuf-de-Randon, en Gévaudan, y meurt d’une forte fièvre le 13 juillet 1380, épuisé. Depuis 1372, Typhaine Raguenel, sa femme aimée, trop tôt disparue, attendait son parfait chevalier au paradis des grandes amours.