L’empereur entre dans la capitale russe le 14 septembre. Le lendemain, elle est en flammes. Elle va brûler pendant trois jours. Napoléon attend. Il attend un signe du tsar. N’est-il pas dans sa ville ? La paix devrait être signée ! Les jours passent. Rien. Le 20 septembre arrive, toujours rien ! Le 13 octobre, les premières neiges tombent. Napoléon décide d’aller hiverner à Smolensk d’où, au printemps, il pourra partir attaquer Saint-Pétersbourg. Mais il faudrait emprunter une route au sud afin de trouver nourriture et fourrage ! Koutouzov barre cette voie du salut. En revanche, les cosaques l’empruntent et peuvent ainsi lancer des raids de destruction contre l’armée française qui est contrainte de suivre la route du nord balayée de vents glacés, couverte de neige. Le repli devient retraite. Et bientôt, c’est la débâcle : aucun vêtement d’hiver n’a été prévu, aucune fourrure : on éventre les chevaux pour trouver un peu de chaleur par les -30° ou -40° nocturnes, puis on les mange. Les blessés sont abandonnés.
Le père de Victor ?
Incroyable : dans la nuit du 22 octobre 1812, à Paris, un général quitte la Maison de santé du docteur Dubuisson où il était assigné à résidence. Il annonce partout la mort de l’empereur, obtient une salle à l’hôtel de ville afin d’y faire siéger son gouvernement provisoire. Il fait transmettre ses ordres à l’armée qui obéit au point que, vers midi, il est maître des trois quarts de la capitale. Il fait libérer Victor Faneau de Lahorie et Emmanuel Guidal, des royalistes emprisonnés qu’il se prépare à promouvoir à des postes importants, les ministres de Napoléon ayant été destitués et incarcérés à la Force.
Mais, un autre général connaît bien les étrangetés de Malet, il déjoue le complot. Malet, Lahorie, Guidal et une douzaine d’officiers sont arrêtés, jugés et condamnés à mort – il ne leur est pas même venu à l’idée, annonçant la mort de Napoléon, qu’il avait un fils, le roi de Rome… Ils sont fusillés le 29 novembre 1812. Lahorie ! Victor Faneau de Lahorie, l’un des trois conjurés qui tombent sous les balles connaît intimement la femme d’un général d’Empire ; elle a pour nom Sophie Trébuchet, elle est mère de trois enfants : Abel, Eugène et Victor. Lahorie a donné son prénom à ce dernier dont il est le parrain. Certains ont même prétendu qu’il était son père ! Mais il semblerait que ce soit faux : Lahorie ne serait pas le père de Victor… Hugo !
« Il neigeait. On était vaincu par sa conquête. / Pour la première fois l’aigle baissait la tête. / Sombres jours ! L’empereur revenait lentement, / Laissant derrière lui brûler Moscou fumant. / Il neigeait. L’âpre hiver fondait en avalanche. / Après la plaine blanche une autre plaine blanche. / On ne connaissait plus les chefs ni le drapeau. / Hier la grande armée, et maintenant troupeau… » Nul mieux que Victor Hugo n’a décrit la retraite de Russie. Vous pouvez lire la suite de
Les attaques de cosaques sont incessantes. Le 25 novembre, l’empereur et sa troupe arrivent au bord de la rivière, la Bérézina. Plus de 100 000 Russes les attendent. Napoléon ne dispose que de 25 000 hommes valides, de 30 000 autres à demi blessés, moribonds. C’en est fait se disent les Russes, la Grande Armée a vécu ! Mais, en amont de leur position, les Français trouvent un passage à gué sur lequel ils construisent des ponts au prix d’incroyables sacrifices en vies humaines ! Du 26 au 28 novembre 1812, ce qui reste de l’armée franchit ces ponts par -20° ou -30°. Parmi eux, un commissaire aux approvisionnements, nommé Henri Beyle, connu en littérature sous le pseudonyme de Stendhal…
À neuf heures du matin, le 29 novembre, les cosaques attaquent le reste des Français n’ayant pas encore franchi les ponts qui doivent alors être détruits pour protéger la retraite. Huit mille soldats restés sur la berge vont être massacrés par les Russes ! Le 5 décembre, Napoléon confie le commandement de ce qui reste de son armée à Murat qui, considérant la partie perdue, s’enfuit le 12 dans son royaume de Naples ! Le 13 décembre, les soldats repassent le Niémen. Le 18 décembre, l’empereur est à Paris. Il laisse derrière lui 380 000 tués ou blessés, 180 000 prisonniers ; seuls quelques milliers de soldats en armes atteindront le lieu d’où, six mois auparavant, étaient partis 700 000 hommes !
« Tuez-le ! Je prends tout sur moi ! »