Le futur Charles X n’est pas pour rien dans cette agitation fiévreuse qui vise à rétablir la royauté à l’ancienne. Il met en place une solide organisation qui permet d’accroître l’influence ultraroyaliste dans les départements. Partout, on plante des croix dans les campagnes, pour expier ce qui est qualifié de crimes par ceux qui n’ont jamais accepté la Révolution. Les Jésuites reviennent, ouvrent des collèges, des séminaires. Bientôt, la Chambre introuvable exige le suffrage universel parce que la population française, essentiellement paysanne, est en majorité royaliste ; elle exige aussi le régime parlementaire qui permettrait de ne plus tenir compte de l’avis des ministres que le roi nomme afin de rétablir l’équilibre. Trop, c’est trop ! Elle en demande trop cette chambre que Louis XVIII, son ministre de la Police, Élie Decazes, et son ministre des Affaires étrangères, le modéré Armand de Richelieu – le descendant du Grand Richelieu - décident de dissoudre le 5 septembre 1816.
Une nouvelle Chambre est élue, modérée, mais Armand de Richelieu qui ne partage pas les mêmes idées que Decazes sur les questions électorales démissionne, ce qui laisse le champ libre à Decazes. Celui-ci pratique une politique libérale, fait voter des lois en faveur de la presse. Le vieux roi Louis XVIII, bien seul aux Tuileries, s’est fait de Decazes plus qu’un ami : il le considère comme le fils qu’il n’a jamais pu avoir. Il l’appelle « Mon cher enfant ! », languit lorsqu’il ne reçoit pas de message d’Élie. Tout cela déchaîne la jalousie, presque la rage des ultraroyalistes qui traitent le faux fils préféré d’« huissier gascon » – Decazes est originaire de Guyenne –, de « parvenu roturier » ou encore de « champignon » ! Mais Decazes n’en a cure ! Le roi l’a marié à une jeune fille d’à peine seize ans, qui appartient à la noblesse allemande : Édégie de Sainte-Aulaine. Il demande à être parrain du premier-né du couple. Et toujours, avant de prendre quelque décision que ce soit, Élie est consulté, de sorte que certains commencent à parler d’Élie Ier…
Les Ultras ! Le retour ! La démission de Decazes leur ouvre une voie royale. La Chambre élue en 1821 est majoritairement royaliste. Le comte de Villèle, le Toulousain plus royaliste que le roi, est nommé Premier ministre. 1824 : nouvelles élections. La majorité royaliste y est écrasante ! Il ne reste plus qu’une quinzaine de libéraux. C’est une Chambre introuvable bis : la Chambre retrouvée ! Villèle et ses proches, depuis 1821, retroussent leurs manches. La répression est active : les sociétés secrètes, les comploteurs sont arrêtés, jugés et condamnés. Quatre jeunes sergents de La Rochelle, par exemple, Bories, Goubin, Pommier et Raoulx, qui, appartenant à la société secrète de la Charbonnerie – composée de républicains, de bonapartistes, de libéraux –, n’ont pas voulu dénoncer leurs chefs. Le 21 septembre 1822, ils sont exécutés en place de Grève devant une foule muette qui admire leur courage.
Marie-Caroline, duchesse de Berry
Parce qu’il ne reste plus de descendant mâle de la branche aînée des Bourbons, et que ce sont les Orléans qui risquent de monter sur le trône, Louis XVIII a décidé de marier son neveu – qui est le fils du futur Charles X –, le duc de Berry, à Marie-Caroline de Naples qui appartient à la famille des Bourbons-Sicile et descend, par sa mère, de la Maison des Habsbourg ! La rencontre entre Marie-Caroline et le duc de Berry a lieu en forêt de Fontainebleau, au carrefour de la croix Saint-Herem.