Une Chambre de députés pleine de libéraux ! Charles X enrage ! Que faire ? Serrer la vis à tout ce monde qui veut installer en France un régime parlementaire ! On va bien voir ! Fort du succès de l’expédition d’Algérie – la France est allée s’emparer d’Alger, sur une idée de Polignac –, et sans tenir compte du déséquilibre de la nouvelle Chambre qui ne compte que 43 ultras contre 274 libéraux, Charles X signe quatre ordonnances destinées à affermir son pouvoir. Il refuse les concessions : « Ce sont les concessions qui ont perdu mon frère Louis XVI, dit-il, j’aime mieux monter à cheval qu’en charrette ! » Décidément, ces Bourbons, quel sens de la formule !
Charles X ne va monter ni à cheval ni en charrette, il va être mis à pied par les événements de juillet. Les quatre ordonnances prévoient
Les utopies de Charles Fourier
Peut-on imaginer une société harmonieuse, où les passions de chacun seraient totalement satisfaites – où l’insécurité, la pauvreté, endémiques en 1830, n’existeraient plus ? Vous en avez rêvé ? Charles Fourier l’a fait !
Pour Fourier (1772 - 1837), Claude de Saint-Simon (1760 - 1825) qui prétend organiser la société pour favoriser l’industrie est un charlatan ! Fourier considère que les sociétés humaines sont des forêts de sentiments inexplorés, attaqués et repoussés par l’État et la religion, sentiments qu’il faut identifier comme on a pu le faire pour les végétaux. Il recense donc les passions (sensuelles, affectives, distributives) et imagine des unités de vie où les habitants sont rassemblés en fonction de leur passion dominante.
L’identification de la passion dominante permet de régler harmonieusement l’activité du groupe : les « cabalistes » qui ont la passion de l’organisation conduisent les travaux ; les « papillonnes » qui aiment le changement assurent les tâches saisonnières ou temporaires ; les « petites hordes » sont composées d’enfants chez qui on a remarqué une passion pour la manipulation d’immondices : ils vont servir d’éboueurs… Ainsi est obtenue une société qu’il qualifie de chimiquement parfaite.
Chaque unité de vie, la phalange – qui remplace la famille, source de conflits et d’autorité –, compte 1 600 personnes, hommes et femmes à égalité. Elle est logée dans un phalanstère. C’est une sorte de palais en forme d’étoile au milieu d’un parc de 400 hectares Le logement et la nourriture y sont collectifs. Les salaires sont déterminés sur la base du capital, du travail et du talent. Tout y est réglé au préalable, jusqu’à la façon de s’habiller. La polygamie y est étendue à tous afin de ne plus contrarier les sentiments et de parvenir à une nouvelle forme de chasteté…
Le phalanstère comporte des galeries marchandes, des bibliothèques, un temple pour accueillir 1 500 personnes. 90 % des phalanstériens sont des cultivateurs ou des artisans ; les 10 % restants sont des artistes et des savants. Les enfants sont élevés en commun, l’éducation conjugue théorie et pratique, chaque membre – connaissant vingt métiers – en pratiquera cinq ou six par jour.
Les disciples de Fourier tentent de réaliser l’utopie du maître : c’est un échec total. Seul le fabricant de poêles Godin (1817 - 1888) obtiendra des résultats positifs. Il crée en 1856 – à Guise dans l’Aisne – au lieu du phalanstère, le familistère. Il y institue le système coopératif. Ce familistère comporte 500 logements – familiaux et traditionnels… – au confort moderne : eau courante, toilettes, vide-ordures, luxe incroyable à l’époque. On y trouve aussi un théâtre, des économats, des écoles, des pouponnières, une piscine, un lavoir, un parc… Le familistère, enfant de l’utopie fouriériste – qu’on peut visiter aujourd’hui à Guise – est tombé dans l’escarcelle capitaliste en l’an… 1968 !
Allumer une bombe n’aurait pas davantage d’effet : le 26 juillet 1830, les ordonnances sont signées, le 27, c’est l’explosion. Dans Paris où la troupe investit les imprimeries qui ont bravé l’interdit de publication, la population se masse aux carrefours. Les soldats chargés de les disperser reçoivent sur la tête des pots de fleurs, des tuiles, des bûches. Des barricades commencent à barrer les petites rues. Des cocardes tricolores font leur apparition. Les républicains, pleins d’espoir, sont en première ligne.