Thiers, devenu trop républicain pour l’Assemblée, doit démissionner le 24 mai 1873. Le nouveau président de la République est légitimiste. Son nom n’est pas inconnu, c’est le défait de Sedan, le chef des troupes versaillaises : le maréchal Mac-Mahon. Il promet le retour à l’ordre moral au moyen d’un gouvernement énergique. En réalité, les monarchistes l’ont élu à ce poste parce qu’ils espèrent que le comte de Chambord va se décider à occuper le trône qui l’attend. Pourtant, le comte – Henri V – qui poursuit son exil en Autriche, est sans descendance. Qu’à cela ne tienne ! Les monarchistes ont tout prévu : dans quelque temps, le comte de Chambord monte sur le trône, il meurt – le plus vite possible… – et il est remplacé par le comte de Paris, un Orléans, petit-fils de Louis-Philippe. L’avantage, avec le comte de Paris, c’est que sa descendance est nombreuse, elle permet d’envisager que le régime monarchique durera pour des siècles, des siècles…
L’ordre moral du maréchal
L’ordre moral ! Lorsque le maréchal Mac-Mahon, président de la République, lance cette petite phrase-programme le 26 mai 1873 à l’Assemblée, il ne se doute pas de la fortune qu’elle va connaître ! Que comporte ce retour à l’ordre moral ? La volonté de l’Église, et de la société attachée aux traditions, de lutter par tous les moyens contre le socialisme et tout ce qui lui ressemble. Les processions se multiplient dans les campagnes, on plante des croix à tous les carrefours, dans tous les villages. Le mois de Marie est inventé, de même que le culte de l’Immaculée conception. Les lieux d’apparition deviennent des buts de pèlerinage d’autant plus encouragés que les miracles s’y multiplient ! À Paris, on met en œuvre le projet qu’avait formulé au Mans, le 17 octobre 1870 en pleine occupation prussienne, le père Boylesve : construire une basilique consacrée au Sacré-Cœur, à Paris, sur la Butte Montmartre.
Le 5 août 1873, une commission de députés rend visite au comte de Chambord près de Salzburg. Cette commission croit comprendre que le comte est prêt à monter sur le trône de France. Il n’a pas été question du drapeau blanc, mais on imagine qu’il ne s’obstinera pas. Tout se prépare alors pour le grand jour : carrosses, costumes, le trône lui-même, artistement ouvragé dans le style Grand Siècle, on met au point la cérémonie, le parcours du cortège. Tout ce que la France compte de comtes, de comtesses, de barons, de ducs et de petits marquis, froufroute de partout ! Hélas ! Le 23 octobre 1873, de son château autrichien, le comte de Chambord lance cette terrible nouvelle : le drapeau blanc ou rien. Ce sera rien ! Les monarchistes sont consternés ! Ils espèrent encore que le petit-fils du frère de Louis XVI va revenir sur sa décision. À l’initiative de leur chef, le comte de Broglie, ils prolongent le mandat du président Mac-Mahon, instituant ainsi le septennat présidentiel.
La IIIe
République qui s’installe officiellement dans les faits et dans les textes en 1875 va offrir aux Français l’école primaire gratuite et obligatoire. Mais elle va aussi se fourvoyer dans le boulangisme, s’enliser dans la colonisation, se mesurer à l’antisémitisme avec l’affaire Dreyfus. Tout cela en préparant la terrible revanche de 14-18…