Aussi, en novembre 751, Pépin reçoit l’onction sacrée de la main de Boniface (promu, depuis, saint Boniface). Cette onction est renouvelée en 754 par le pape lui-même, Étienne II, venu demander à Pépin de le défendre contre des Lombards un peu envahissants. Et cette seconde onction, plus solennelle, est donnée en l’église abbatiale de Saint-Denis. Voilà Pépin solidement sacré roi des Francs. Tant qu’il y est, le pape oint, oint (du verbe oindre ; j’oins, tu oins, il oint, nous oignons, il a oint, que j’oigne, que nous oignions…).
Son élan s’arrête. Sait-il, à ce moment précis, qu’il vient d’inaugurer la royauté de droit divin, et que ce type de royauté où tout est chapeauté par Rome va durer, durer plus de dix siècles ?
Les Mérovigiens
Chapitre 4
768 à 814 : Charlemagne l’EuropéenIl est très inconfortable de gouverner à deux, de guerroyer à deux, les énergies se dispersent, les disputes épuisent les énergies. Charlemagne qui s’apprêtait à faire la guerre sur tous les fronts en compagnie de son frère, va se retrouver seul…
Pépin le Bref meurt en 768, le 7 octobre. Son embonpoint de bien portant n’était qu’une hydropisie qui l’emporte après qu’il a effectué le partage traditionnel de l’héritage : une partie du royaume pour Carloman, l’autre pour Charles. Et deux capitales : Carloman à Soissons, Charles à Noyon. Ainsi, pensait Pépin, la proximité des deux frères permettra qu’ils se consultent, évitera qu’ils se déchirent. Ils font les deux : ils se consultent et se déchirent ! Mais, cela dure finalement peu de temps car, fort opportunément, Carloman meurt en 771 ! Le moine chargé d’annoncer la nouvelle à Charles le fait en ces termes : « Dieu vous a témoigné d’une faveur spéciale en enlevant de ce monde Carloman… » C’est charmant !
Charlemagne poursuit toutes sortes d’objectifs afin de donner à son royaume, puis à son empire, l’organisation qu’il estime la meilleure. Mais pour atteindre ces objectifs, il faut beaucoup de moyens, et ces moyens en général apparaissent sous la forme d’or, d’argent, de trésors. Où les trouver ? Suivons le guide…
Pour Charlemagne, les Saxons, peuple voisin dont il est séparé par des forêts, représentent une sorte d’obsession : il mènera contre eux dix-huit campagnes en trente-trois ans – et seulement cinq contre les Lombards, sept contre les Arabes d’Espagne, cinq contre les Sarrasins en Italie, deux contre les Bretons, quatre contre les Avars… Il ne cesse de combattre les Saxons, de ravager leurs terres. Les accusant de pratiquer des rites barbares, de faire des sacrifices humains et de faire rôtir ensuite les victimes, d’adorer les sources, les arbres, et de tenter sans cesse d’envahir les territoires francs, il fait armer ses sujets tant qu’il peut et ravage tout ce qu’il peut ! En 772, il détruit l’Irminsul des Saxons. L’Irminsul est un tronc qui a la forme d’une colonne supposée soutenir la voûte céleste dans la mythologie saxonne. Au pied de ce tronc, des sacrifices de toutes sortes sont offerts aux dieux, mais aussi de l’or, d’immenses trésors qui sont enterrés ensuite. Charlemagne les déterre et les emporte après avoir vaincu et exécuté les centaines de gardiens du lieu sacré !