Dans la nuit, les Flamands dont les réserves de nourriture ont été détruites, investissent le camp français et pillent les tentes. Le roi s’éveille, on lui amène un cheval et une hache et le voilà à l’œuvre. Tous ses soldats l’imitent, et c’est le carnage : 5 000 Flamands sont tués, leur chef est décapité ; on met sa tête au bout d’une pique et on la montre à Philippe le Bel, qui ne la regarde pas mais dit : « C’est la victoire de Dieu, pas d’un homme ! » Le 23 juin 1305 est signée la paix d’Athis qui humilie et taxe lourdement les révoltés.
En septembre 1307, Philippe le Bel qui méditait depuis longtemps une action d’envergure contre les riches Templiers se décide : des ordres secrets sont envoyés dans tous les royaumes aux baillis et sénéchaux, là où les Templiers possèdent des établissements. Et le 13 octobre 1307, l’incroyable nouvelle se répand : les Templiers ont été arrêtés. Les fameux Templiers…
Qui sont les Templiers ? C’est un ordre religieux militaire fondé en 1119 à Jérusalem par Hugues de Payns, chevalier champenois, et neuf de ses compagnons. Le rôle qu’ils se sont donné au départ est de protéger à Jérusalem, sur le chemin du Saint-Sépulcre, les pèlerins contre les infidèles. Ils assurent en quelque sorte un rôle de police. Et comme ils sont pauvres et n’ont pas de maison, les Pauvres Chevaliers – c’est ainsi qu’ils se nomment à l’origine – vont loger dans une cabane près du temple de Salomon. Ils deviennent alors l’Ordre du Temple, ou Templiers, chevaliers du Temple.
La règle de l’Ordre est établie à Troyes en 1128, règle sévère, austère. Les dons affluent bientôt, et l’ordre, présent dans tout l’Occident – Angleterre, Aragon, France, Portugal, et sur les bords du Rhin – s’enrichit considérablement et ne relève que du pape. Un pas de plus et les voici, grâce à la sûreté de leurs places – 5 000 commanderies – et de leurs méthodes, les banquiers de l’Europe ! Leurs richesses sont surtout constituées de terres et de biens immobiliers. Après l’effondrement du royaume franc de Jérusalem, ils sont 2 000 qui s’installent en France.
Dans un premier temps, Philippe le Bel est satisfait de l’installation des Templiers dans son royaume : il espère se faire admettre dans l’ordre, en devenir le Grand Maître afin d’user comme il l’entend des finances et des biens dont il disposera. Le refus est ferme. Dans l’ombre, le conseiller du roi, Guillaume de Nogaret qui déteste les Templiers – et qui a déjà vaincu le pape en 1303 –, suggère de s’en débarrasser. Il se trouve alors qu’un Templier, incarcéré pour meurtre à Toulouse, fait des révélations étonnantes à son compagnon de cellule : les Templiers ne sont pas ceux qu’on croit, ce sont des sacrilèges, ils crachent sur la croix, doivent baiser certaines parties du corps de leurs supérieurs, et même bien davantage.
Philippe le Bel informé de l’affaire décide que dès le soir, Jacques de Molay et trente-sept de ses compagnons seront brûlés sur un bûcher dressé sur l’île aux Juifs (square du terre-plein du Pont-Neuf). Jacques de Molay meurt en criant : « Les corps sont au roi de France, les âmes sont à Dieu. » Et puis dans ses dernières paroles, il cite le pape et le roi à comparaître devant Dieu dans les quarante jours : le pape Clément V meurt le 20 avril 1314, Philippe le Bel, le 29 novembre… Impressionnant ! Mais faux car cette anecdote a été inventée des années plus tard. Avouez cependant que, pendant une fraction de seconde, vous y avez cru ! Et si l’anecdote, finalement, n’était pas inventée…
Les rois maudits