Читаем Les lauriers de flammes (1ère partie) полностью

— Vous êtes vraiment d'une grande imprudence. Madame, déclara tout à coup une voix grondeuse qui fit sursauter Marianne. Il fait froid et humide sur ce port et voilà trois bons quarts d'heure que vous y êtes, debout et au milieu d'une foule, en danger d'être bousculée. Je vous avais pourtant bien recommandé de vous ménager.

Arrachée à sa songerie, la jeune femme s'aperçut que Jolival n'était plus auprès d'elle. Il avait rejoint Achmet sur la dunette du navire. En revanche, un homme de taille moyenne, blond avec de jolis favoris frisés et une élégance toute britannique, se tenait à sa place et la regardait d'un air mécontent. Elle lui sourit gentiment et lui tendit la main.

— Me feriez-vous l'honneur de me surveiller, mon cher docteur ? En ce cas, vous faites preuve d'une grande patience si vous avez réussi à rester trois quarts d'heure sans venir me faire des reproches...

— Je ne vous surveillais pas, Princesse, mais depuis tout ce temps, nous sommes là-bas, Lady Hester et moi, à parlementer avec une armée de capitaines de bateaux grecs, tous plus bavards et plus filous les uns que les autres et j'espérais toujours que nous allions en finir pour que je puisse vous faire rentrer à la maison, mais ces gens-là connaissent l'art des palabres autant et mieux qu'une tribu guinéenne ! Quant à Lady Hester, elle en remontrerait à un roi nègre ! J'ai fini par perdre patience, mais elle y est encore. Voyez-la, dans un de ces costumes aberrants qu'elle adore, debout sur cette planche avec ce grand diable en bonnet rouge, crasseux comme il n'est pas permis ! Ma parole, je jurerais qu'elle prend plaisir à ce genre de discussion. Si ses amis de Londres pouvaient la voir...

Marianne se mit à rire de bon cœur. Ce n'était pas l'une des moindres étrangetés de sa situation que son médecin actuel fût un Anglais bon teint et que ce médecin, le Dr Charles Meryon, fût devenu un ami. Mais, au lendemain de son installation dans le palais du Phanar, elle s'était trouvée tout naturellement mêlée à la vie de son hôtesse et elle avait découvert que cette vie était très cosmopolite.

La politique, en effet, n'intéressait guère la princesse Morousi qui trouvait normal de recevoir pêle-mêle des gens qui, sur un autre terrain que son salon, se fussent au moins tourné le dos. Elle n'avait pas plus de préjugés raciaux que d'opinions concernant le bien-fondé de telle ou telle guerre ou de telle ou telle querelle privée. Ses amis étaient grecs, turcs, albanais, russes, valaques, français ou anglais, peu lui importait ! Tout ce qu'elle leur demandait, c'était de lui plaire et, surtout, de ne se montrer jamais ennuyeux. Moyennant quoi elle leur dispensait une hospitalité fastueuse et une amitié qui ne se reprenait à aucun prix, mais qui, déçue, ne pardonnait pas.

Et Marianne, amie personnelle et ambassadrice occulte de Napoléon, s'était retrouvée, grâce à elle, pratiquement dans les bras de la nièce du grand Pitt, de l'homme,qui avait été le mortel ennemi de la France en général et de Napoléon en particulier, autrement dit de Lady Hester Stanhope à laquelle l'avait aussitôt liée une sympathie aussi spontanée qu'immédiate, dont elle n'avait même pas cherché à se défendre.

Lady Hester était sans doute l'un des personnages les plus curieux et les moins conformistes que l'Angleterre eût jamais produits. La mort de son oncle, dont elle avait été le soutien, la collaboratrice et l'égérie pendant plusieurs années, puis celle de son fiancé, le général John Moore, tué en Espagne dans la dure bataille de La Corogne, auraient dû normalement l'abattre et la réduire à l'ombre discrète d'une espèce de veuve doublée d'une orpheline. Mais, après avoir régné sur la politique et sur la gentry, Lady Hester, à trente-quatre ans, s'était refusée à la vie étroite, étouffante d'une vieille fille au fond d'un comté anglais.

Elle avait choisi l'aventure et, un an et demi plus tôt, le 18 février 1810 exactement, elle avait secoué de ses souliers la poussière du pays natal. Sans grand esprit de retour, elle s'était embarquée à Portsmouth pour les pays d'Orient dont la magie, depuis toujours, agissait sur son imagination passionnée. Mais elle ne partait pas seule : avec elle s'embarquait sur la frégate Jason, cette vieille connaissance de Marianne, toute une suite, comme il convient à une reine en exil.

Après un voyage de plusieurs mois, on avait enfin atteint Constantinople et la voyageuse, gagnée par le charme de la ville, y résidait depuis un an, recevant la meilleure société et reçue par elle, y compris par le Sultan, menant grand train, grâce aux abondants subsides que le père de Michael Bruce son ami de cœur faisait parvenir à son fils, car Lady Hester, malgré ses goûts fastueux, n'avait guère de fortune... et entretenait une fureur* latente au cœur de l'ambassadeur anglais.

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