Читаем Les lauriers de flammes (1ère partie) полностью

Il s'était levé et il arpentait la pièce avec emportement. Marianne, soudain glacée, le vit saisir le lourd encrier de bronze posé sur son bureau et l'envoyer à toute volée dans l'une des bibliothèques dont la porte s'effondra dans un fracas de verre brisé.

— Maudit ! Je suis maudit ! gronda-t-il. Vous ne savez pas ce que c'est que ne plus pouvoir aimer, ce qui s'appelle aimer. Moi, je l'avais oublié, mais, tout à l'heure, à votre contact, j'ai senti... ah ! cette sensation inouïe, inespérée... j'ai senti que ma chair pouvait encore s'émouvoir, que je pouvais encore désirer une femme, que peut-être ma vie pourrait recommencer. Mais non ! C'est impossible ! Depuis ce jour affreux, tout est fini... fini ! Pour toujours !

Une nouvelle crise de larmes le secouait, si violente que Marianne eut peur. Le malheureux semblait si près de toucher le fond du désespoir qu'elle chercha comment lui porter secours. Sur une petite table, près de l'une des fenêtres, il y avait un plateau d'argent supportant une carafe d'eau, quelques verres et un flacon plein d'une liqueur sombre qui devait être du vin. Vivement, elle alla jusqu'à cette table, emplit un verre d'eau. Mais, au moment où elle allait l'apporter à Richelieu qui s'était laissé tomber sur le pied du canapé, une idée lui vint. Fouillant dans la poche de sa robe, elle en tira un petit sachet contenant une poudre grisâtre.

Tout à l'heure, quand elle avait quitté sa chambre pour ce souper qui lui faisait si grand-peur, elle avait emporté ce sachet. Il contenait une préparation à base d'opium que le médecin persan de Turhan Bey lui avait confectionnée quand, vers les derniers temps de sa grossesse, elle avait toutes les peines du monde à trouver le repos. Cela procurait rapidement un sommeil profond et agréable et Marianne s'était dit que ce pourrait être une arme utile au cas où Richelieu se montrerait trop entreprenant...

Avec un petit sourire amer, elle en versa une pincée dans le verre, ajouta un peu de vin pour faire disparaître le goût. Le duc s'était montré plus qu'entreprenant et cependant elle avait oublié cette arme qui lui avait paru si précieuse tout à l'heure. A moins qu'elle n'eût simplement refusé d'y penser tant le besoin d'amour s'était fait soudain violent et impérieux en elle. Maintenant, la drogue bienfaisante allait servir une intention charitable. Elle procurerait à un malheureux un peu d'apaisement et d'oubli...

Se penchant sur lui, elle l'obligea doucement à relever la tête.

— Buvez cela ! Vous vous sentirez mieux... Buvez, je vous en prie et étendez-vous !

Avec une docilité d'enfant il but jusqu'à la dernière goutte puis s'étendit sur les coussins où tout à l'heure il avait couché Marianne. Ses yeux étaient rougis par les larmes et pleins d'une gratitude qui serra le cœur de la jeune femme.

— Vous êtes bonne, murmura-t-il... Vous me soignez comme si je ne m'étais pas couvert de ridicule à vos yeux...

— Je vous en prie, ne parlons plus de cela !

Elle lui sourit avec gentillesse tout en glissant un coussin sous sa tête. Puis, pour qu'il pût mieux respirer, elle défit la haute cravate, ouvrit le jabot de la chemise que la sueur avait collée à un torse brun et osseux. Puis, elle alla tirer l'un des rideaux et ouvrir l'une des fenêtres pour que l'air frais de la nuit vînt remplacer l'atmosphère épaissie du bureau.

— Si ! soupira-t-il. Parlons-en !... Il faut que vous sachiez... Vous avez le droit de savoir pourquoi le petit-fils du maréchal de Richelieu, du plus grand coureur de jupons du siècle dernier, n'est même pas capable de faire l'amour... Ecoutez : j'avais seize ans, en 1782... seize ans quand on me maria à Mlle de Rochechouart qui en avait douze ! C'était une grande union, digne de nos deux familles et le mariage, comme les mariages royaux, fut conclu par nos parents sans que l'on eût sollicité notre avis. Et ce fut par procuration que j'épousai ma fiancée. On la jugeait trop jeune, me dit-on, pour l'accomplissement du mariage mais, pour raison de famille, il fallait que ce mariage fût conclu.

— Je vous en prie, supplia Marianne. Ne me dites rien ! Vous allez réveiller des souvenirs qui vous font mal, bien certainement. Et...

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