Читаем Les lauriers de flammes (1ère partie) полностью

Dans une accalmie du vent, il entendit l'horloge d'une des églises de Péra sonner 5 heures et cela lui donna une idée. L'ambassade de France n'était pas loin et la chapelle de cet ancien couvent des Franciscains comportait un clocher, en mauvais état, mais d'où la vue s'étendait sur le Bosphore et sur la Corne d'Or. Dès que le jour poindrait il serait au moins possible, de là-haut, de voir ce qu'il advenait de la Sorcière et, peut-être, de la bande audacieuse qui allait tenter de s'en emparer.

Laissant sa cavalerie attachée aux platanes pour que le bruit de ses sabots ne réveillât pas tout le quartier, rigoureusement désert à cette heure matinale d'hiver, Jolival prit sa course vers le palais de

France. Une fois le portier réveillé, ce qui n'alla pas sans mal, il n'eut aucune peine à se faire ouvrir. Le bonhomme considérait avec révérence l'habituel partenaire aux échecs de Son Excellence l'Ambassadeur, et, bien qu'on ne l'eût pas vu depuis longtemps, M. le vicomte de Jolival fut reçu avec les honneurs dus à son rang. En revanche, il eut beaucoup plus de peine à obtenir que l'on ne réveillât pas Latour-Maubourg.

— Je me suis attardé au chevet d'un ami malade, en grand péril de mort, déclara-t-il au bonhomme. Aucune église n'est encore ouverte et cependant je voudrais beaucoup prier pour sa pauvre âme en péril. Ne réveillez pas Son Excellence : je la verrai plus tard ! Pour le moment, je voudrais seulement être seul, dans la chapelle, et prier.

Cet énorme mensonge passa comme un coup de vin vieux. Jolival savait à qui il avait affaire. En bon Breton, Conan, le portier de l'ambassadeur, faisait preuve d'une piété sourcilleuse qui s'accommodait fort mal de son séjour en terre d'Islam. Aussi fut-il agréablement surpris de découvrir des sentiments si élevés chez l'ami de son maître.

— L'amitié est une belle chose et la crainte de Dieu une plus grande encore ! déclara-t-il d'un ton sentencieux. Si Monsieur le vicomte veut bien me le permettre, je dirai moi-même quelques dizaines de chapelet à l'intention de son ami. Pour l'heure présente, la chapelle est toujours ouverte. Monsieur le vicomte n'a qu'à s'y rendre. Il y a des cierges et un briquet à l'entrée. Monsieur le vicomte sera chez lui.

C'était tout ce que souhaitait Jolival. Un peu gêné par l'auréole qu'il croyait déjà voir pousser dans le regard du concierge posé sur sa tête, le vicomte remercia chaleureusement, renforça l'estime du bonhomme par le cadeau discret d'une pièce d'or et s'élança sous les arcades de l'ancien cloître pour gagner la chapelle.

La porte ne grinça qu'à peine quand il l'ouvrit et il retrouva l'odeur familière de cire refroidie, d'encens et de bois bien encaustiqué. En effet, le bon Conan, pour lutter à sa manière contre l'Infidèle, prenait de « sa » chapelle un soin touchant.

Trouver des cierges, les allumer avec le briquet afin que le concierge pût apercevoir les vitraux éclairés, ne demanda que peu d'instants et bientôt Jolival s'élançait dans l'étroit escalier en colimaçon qui ouvrait près de l'entrée, l'escaladant deux marches à la fois avec une ardeur de jeune homme.

Il savait où trouver, près du logement de la cloche, certain instrument du plus haut intérêt pour ses intentions : une longue-vue grâce à laquelle l'ambassadeur surveillait les mouvements du port et, à l'occasion, ceux de son collègue et voisin, l'ambassadeur d'Angleterre, sa bête noire la plus habituelle.

Le campanile n'était pas très élevé, mais son altitude était très suffisante pour que, de jour évidemment, on ne perdît rien de ce qui se passait aux environs de la Tour de la Fille. D'ailleurs, lorsque Jolival, un peu essoufflé, arriva au sommet, la nuit commençait à céder...

Une bande plus claire se montrait derrière les collines de Scutari comme si le ciel, lentement, se décolorait. Dans un moment, le détroit serait visible, mais l'on n'en était pas encore là. S'adossant au mur, Jolival, sa longue-vue sous le bras, essaya d'attendre sans trop d'impatience, pensant que le jour était incroyablement paresseux ce matin-là !

Peu à peu, comme une scène de théâtre dont le rideau s'élèverait avec une extrême lenteur, la majestueuse croisée du Bosphore et de la Corne d'Or se dégagea dans l'obscurité et commença de dessiner ses contours. Elle apparut, dans la grisaille uniforme du petit matin qui unissait le ciel, où voyageaient des nuées rapides emportées par le vent et la mer plumée d'embruns semblables à d'hùmides nuages.

Tout à coup, Jolival saisit la longue-vue et, avec une exclamation de joie, la cala dans son orbite. Là-bas, près du petit fortin de bois qui couronnait les ruines de la tour, la Sorcière hissait ses voiles basses. La misaine se gonfla puis le petit foc, car le vent de tempête empêchait de faire porter toute la toile.

— Ils ont réussi, exulta Jolival pour lui tout seul. Ils partent...

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